Choses aimées 23-21

Our faces: a map of practiced emotions.
Our hands: clues as to how we spend our days.
Where’s my kind?,Veronique.ink

our faces, our hands, our days

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Comment conciliez-vous vie professionnelle et vie privée ? Pas très bien, en toute honnêteté. Je trouve difficile de concilier vie professionnelle et écriture et vie personnelle. Je trouve difficile de m’arrêter avant de m’épuiser, difficile d’écrire tous les jours quand je préférerais prendre du repos, difficile de trouver le temps et l’énergie de tout faire bien.
Le jour où j’admets que je ne suis pas parfaite – Hortense Merisier

le temps et l’énergie de tout faire bien

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People share bits of themselves through writing/art that wouldn’t arch over into typical conversations. That’s why I love personal blogs/zines: the intimacy, the vulnerability, the laid-bare truths.
Connecting through art, Veronique

the intimacy, the vulnerability

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Cette semaine les décisions à prendre, les activités à prioriser, se sont bousculées dans ma vie et plus elles se sont ajoutées, plus j’ai voulu aller vite… et plus j’ai fait des conneries. Conneries qui m’ont demandé de refaire des trajets, de réécrire des textes effacés par mégarde.

Au bout de la 14ème bêtise, la phrase s’est imposée à moi. Celle du détour. Et sa grande. soeur : nature doesn’t hurry, yet everything is accomplished. Je me les répète en boucle, plus ou moins ; avant de t’écrire, oui j’étais à la bourre, mais j’ai pris le temps de fabriquer le début d’un marque page avec des scraps of papers que j’accumule depuis toutes ces années. Déjà me pose ; ce détour m’aide à me tranquilliser.
[sur le marque-page pris en photo, on peut lire : « si tu es pressée, fais un détour »]
Christie dans sa dernière newsletter

si tu es pressée, fais un détour

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Écris quelques mots, 480 signes ou plus tous les jours Note des paroles chopées au vol
Lis pour écrire, écris pour lire
Essaie d’aller voir du côté du journal de Kafka
Marche et perds-toi dans la ville
Marche, observe et écris dans ta tête ou sur ton téléphone
Ecris ce dont tu ne te sais pas dépositaire comme le dit François Bon
N’hésites pas à recopier des extraits de textes aimés Reprends tes notes journalières, donne leur de l’épaisseur, de la hauteur, de la couleur et publies-les sur ton blog sans te soucier de tes lecteur.rices.
Ajoute des photos, des dessins… et trouve ta singularité.
Ouvre ton carnet du lendemain et lance toi sans penser à ce qui précède !
neuf instructions pour son double pour que continue le carnet – Carnet individuel – Isabelle Vauquois

écris, essaie, trouve, marche et perds-toi
sans penser à ce qui ce précède

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What is the most effective “productivity technique” in the world? I don’t think it’s a spreadsheet, a day planner, a time-batching system, or a smartphone app. I think… it’s forgiveness.

Forgive yourself. Forgive yourself for saying “yes” to too many projects. Forgive yourself for getting behind on your emails. For needing an extension to finish that project. For being late, behind, backed up, crushed, buried, whatever your situation may be. Forgive yourself for missing that typo. For disappointing a colleague. For the foolish, irresponsible mistake you made. For whatever horrible “crime” you feel you’ve committed.

You did it. It happened. You learned. Now it’s over. And hopefully you won’t do that again. Meanwhile, punishing and pummeling yourself is not helping you to “work faster,” is it? Self-criticism is not fuel — it’s just a burden. It’s a heavy weight to carry, when your workload is already heavy enough.

Can you extend compassion to yourself, just as you’d extend compassion to a friend?
When your brain is so crammed, so stressed…Alexandra Franzen

forgiveness

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Ce que je découvre de sa vie, je devrais dire ses combats, me bouleverse, je lui demande si je peux, nous nous étreignons, nous ne devrions jamais renoncer à nos besoins de tendresse.

Le terrible blues de la reprise cède à un semblant d’élan retrouvé. Chercher de nouvelles manières de faire, les mettre en œuvre, s’y coller vraiment.
Quitter l’île et rêver (se), Caroline Diaz

nos besoins de tendresse

Ce qu’on fera après

Bonjour par ici,

Je viens d’écouter un webinaire en direct d’Emilie Doré intitulé “Pourquoi réussit-on sa thèse ?”. La première question serait plutôt : mais pourquoi diable se tanquer sur zoom un vendredi bleu soleil pour suivre un tel webinaire alors même qu’on ne fait pas de thèse ? Oui, c’est un premier sujet qui mérite éclaircissement.

Je prends tout. Tout ce qui m’aide à travailler, tout de suite maintenant et/ou dans la durée. Et parmi mes ressources favorites, il y a les témoignages des valeureuses et valeureux doctorant·e·s, et les conseils qui leur sont destiné·e·s. J’avais ainsi beaucoup apprécié la conférence de Geneviève Belleville “Assieds-toi et écris ta thèse” et le vlog de thèse de Manon Bril. En reprise d’études depuis un bon moment – et pour encore un long moment -, je glane dans tous les recoins du web ce qui m’aide à lire, à écrire, à tenir, à trouver mon plaisir, ma méthode et ma persévérance.

Nous sommes vendredi et, après un charmant déjeuner, je décide donc de me connecter pour écouter religieusement “Pourquoi réussit-on sa thèse ?”. Très bon webinaire où beaucoup de mises en garde et de conseils font écho à mon expérience actuelle.

Un point en particulier retentit à mes oreilles : continuer de vivre sa vie, ne pas opposer la thèse et la vie. Emilie Doré rappelle qu’il est fréquent de remettre à l’après-thèse les grands projets de vie, et de sacrifier radicalement les loisirs, les temps avec ses proches, les temps pour prendre soin de soi, en se disant : “après, je serai heureux·se !”. Mais c’est bancal et très risqué : d’abord parce que ces temps qu’on sacrifie sont essentiels, nous donnent de l’énergie aussi pour “la thèse” (on va remplacer par “le projet”), et ensuite parce que le mode de fonctionnement mis en place pour le projet va perdurer quand celui-ci sera terminé. Si on a tourné le dos à beaucoup de choses, elles ne vont pas comme par magie se réinstaller ensuite dans notre vie. Alors oui, placer le projet en haut de ses priorités, faire des ajustements nécessaires par rapport à d’autres activités, mais, dit-elle, surtout pas de sacrifice, on cherche un équilibre.

Quelque chose sonnait terriblement juste pour moi. Je ne me suis pas dit “je serai heureuse après”, car je suis heureuse de cette reprise d’études. Mais fréquemment je retombe dans ce gouffre de certitudes : je ne peux pas m’offrir ce moment de détente, je ne peux pas voir mes ami-e-s, je ne peux pas aller au ciné, je ne peux quand même pas partir en vacances, alors que l’année n’est pas terminée, que je n’ai pas tout validé ! (ce qui n’empêche pas du tout de procrastiner à mort, des heures de ni-travail, ni-détente, avec la culpabilité qui va bien, c’est presque comme si on travaillait puisqu’on pense qu’on devrait travailler, et vous me remettrez trois coups de fouet avec ça).

Oui, sans trop m’en rendre compte, j’ai opposé mes études et la vie. Et je sens bien ces dernières semaines que la fatigue s’accumule, la fatigue aussi de ces dernières années, et que je suis sur le fil. Ce mode de fonctionnement – en effet ça fonctionne, j’ai pu valider, avec des résultats dont je suis très fière, chaque semestre – touche ses limites. Me ressourcer ne peut pas se présenter une fois l’an. Mon expérience d’ailleurs m’apprend qu’une fois que tout est “validé”, quand vient l’été, même partir en vacances devient compliqué. Deux étés déjà que je me trouve un peu désemparée, l’énergie en berne, incapable de programmer quoi que ce soit, l’impression d’avoir absolument tout donné et de ne plus rien pouvoir décider, initier.

Je suis plutôt contente car depuis quelque temps, j’essaie de faire plus de place aux sorties, aux promenades, aux ami-e-s, à l’écriture, prendre soin, maintenant pas plus tard. Reste l’enjeu malgré tout : de bien dire oui à ce qui donne des forces, de l’entrain, ce qui requinque, restaure, nourrit, et réussir à dire non là où c’est trop coûteux, trop énergivore, quand ce ne sont pas les bonnes personnes au bon moment.

Il y a une chose que je n’ai pas réussi à faire : partir. M’autoriser l’escapade, un aller-retour pour voir la mer, des arbres. Être ailleurs. Ça résiste fort ! Partir alors que mes dossiers ne sont pas rendus ? Que j’ai 3 deadlines dans les 2 prochains mois et pris énormément de retard ? Oui, là, ça tempête sévèrement. Comme si je n’avais le droit qu’après.

Est-ce qu’après avoir écrit ça justement, je m’autoriserai enfin à partir sans attendre d’avoir terminé ?

L’écrire est un pas.

Même si c’est trop peu, et pas assez vite

J’avance, j’avance, ça fait du bien ! Je vois ma liste d’articles lus s’étoffer. Même si c’est trop peu, et pas assez vite, c’est toujours toujours mieux que rien.

Dans Zotero, où je rassemble ce qui est à lire, pour limiter mes efforts et mes tourments, je prends simplement les ressources dans l’ordre chronologique d’ajout. Ça me repose la tête de ne pas avoir à décider par quoi commencer. Pas de tergiversations, ma spécialité ! Et plaisir collatéral : j’aime assez découvrir au fur et à mesure quelle sera ma prochaine lecture, à chaque fois me laisser surprendre, j’ai l’impression d’ouvrir un calendrier de l’avent. (J’exagère bien sûr : rien ne bat le chocolat.)

J’ai créé l’autre jour un système de notes qui me va bien pour l’instant. J’utilise enfin réellement l’outil Notion – qui jusqu’ici ne m’avait pas convaincue, du tout. Tous les templates me semblaient diaboliquement complexes.

Cette fois, j’ai juste créé une page du nom de mon cours. J’y consigne mes notes de lecture, et surtout mes “cailloux”, c’est-à-dire des notes que je me laisse après chaque session de travail (une nouvelle pratique que j’aime beaucoup). Dans des encadrés verts, ce sont des observations sur la méthode, des réflexions en cours, pensées-liens-questions sur mon sujet, et des indications éventuelles pour une prochaine session.

Rien de parfait, ni mon système de notes, ni mon rythme… Mais le temps d’écrire ce billet, le marteau-piqueur dans la rue s’est arrêté et moi je peux continuer d’avancer.

Des pensées pour tous nos pas, toutes nos tentatives, chacun-e, chaque jour. Toutes les manières qu’on a d’avancer, même (et surtout) invisibles, insaisissables, dans les interstices de ce qu’on donne à voir.

Gestion de crise

montagne forêt brouillard

D’accord, le yoga. Mon corps me revient. Je cultive l’amour et l’étonnement, au risque des courbatures et de l’essoufflement.

D’accord, un poème. Les mots réclament. J’écoute cet appel, cet élan, au risque des ombres et de l’incandescent.

D’accord, d’accord, mais j’ai 246 références bibliographiques collectées depuis mars dans Zotero (un outil qui permet de…collecter des références bibliographiques : articles, chapitres de livres, livres, etc. et que j’utilise en ce moment pour un écrit à rendre fin juillet dans le cadre de mes études). Elles sont toutes dans mon dossier non lu. Par non lu, il faut comprendre rapidement parcourues, vaguement annotées parfois, puis délaissées pour rebondir et ouvrir 30 ressources supplémentaires. Bref, non lues donc.

J’ai réussi l’autre jour à en lire une en profondeur, victoire, j’ai pu créer un dossier lu et y glisser fièrement cette unique référence. Wooo.

Le choc est visuel : 246 documents d’un côté, un seul de l’autre. Terrible vision de la montagne qui m’attend. Dans un immense brouillard de découragement.

Oui, je bloque. Et je passe mes jours-ci à mener l’enquête intérieure : que se passe-t-il ? de quoi mon cœur bat ? où est la difficulté ? où est l’envie ? Hmm, l’enquête m’inquiète, et n’amène rien de bon. La crise est sérieuse, profonde. Mais je ne crois pas qu’elle se résoudra en restant plantée là, une loupe à la main, à scruter, sourcils en l’air, mes 246 pièces à convictions.

Aujourd’hui, un bon soleil, une jolie sortie, publier les choses aimées… et surtout surtout surtout exfiltrer d’urgence quelques références du dossier non lu.

Et je viens le dire ici pour former un engagement. Augmenter les chances de succès de l’opération exfiltration. Au risque de.

Reprendre le fil

personne lisant une carte routière

De deux sources différentes, le même message. Qui sonne la cloche dans ma caboche.

J’écoute “Procrastination”, saison 7, épisode 15, “Se mettre dans l’écriture”

“Se ménager un petit sas temporel pour fermer proprement sa session de création, ranger ses notes, déterminer où on en est, et en fait, préparer la session d’après, c’est tout bête mais ça peut aider  !” 

Quelques heures plus tard, sur Tipeee, j’écoute les coulisses de la fabrication d’une scène du prochain roman d’Amélie Charcosset qui dit : 

“Cet épisode (….), je l’ai mis en gras parce que ça fait partie des prochaines scènes que je pourrais écrire. J’ai essayé d’identifer dans ma trame les scènes un peu pivots qui pourraient être importantes. Parce que je vais partir en vacances, et je vais laisser le texte pendant plusieurs semaines, et donc j’ai envie de savoir, quand  je rentre, par quoi je vais pouvoir commencer, à quoi je vais pouvoir m’attaquer, comment je vais pouvoir reprendre le fil du projet. Donc, j’ai cette scène-là : je sais ce que je veux que ça raconte, c’est en gras, ça fait partie de mes priorités quand je m’y remettrai.”  

Oh comme j’aurais été bien inspirée d’écouter ça plus tôt !

Je dois reprendre le fil d’un des écrits que je dois produire d’ici fin juillet. (Catégorie #reprisedetudes, pas de scénario ni roman en vue pour le moment, je sais votre immense déception) 

Dernière entrée bien foutraque, je ne sais plus du tout où j’en étais, ni quelles étaient mes pensées les plus pressantes à ce sujet, ma boussole, mon Nord, my next-step. Je suis perdue ! 

Notes pour plus tard : quand tu quittes un écrit, un projet, laisse-toi une miette, un petit bout d’idée-de-là-où-tu-en-étais, et d’où tu allais, une intention, un souvenir, une coloration,  un post-it, consigne, didascalie, pringles, caillou, cacahuète (n’importe quoi !!) qui t’aiguillera la prochaine fois que tu t’y plongeras. 

Un semblant de carte pour retrouver ton chemin.

Voilà, je voulais vous partarger ces deux témoignages, utiles, salutaires, entendus le même jour par chez moi, qui ont résonné fort avec l’épreuve du moment : se replonger dans un projet en cours (mais délaissé). Que la friche soit avec vous ! Et laissez-vous des cailloux.

Quand je reviens écrire ici

Y a pas photo. Quand je reviens écrire par ici, c’est généralement que j’ai un travail à faire + du temps pour le faire + une flemmatrouille maximale de le faire. 

Bingo. C’est bien le cas en ce moment. Et moi qui croyais que j’entretenais une relation houleuse avec mon écriture, ma créativité, toussa toussa. Et qu’on était ces jours-ci… comme en mars, comme en janvier, comme au printemps dernier, en pleine réconciliation après des semaines à s’ignorer. En réalité, j’entretiens aussi-surtout une relation houleuse avec mes études où se suivent des pics insensés d’énergie-boulot et des trous noirs de productivité.  Et ce blog se fait alors le meilleur allié de ma procrastination. 

C’est quand même le bon côté de la procrastination. Quand elle nous pousse à ressortir nos crayons pour dessiner, marie-kondo pour trier, nos éponges pour récurer, nos tapis de gym abandonnés, nos identifiants du site des impôts et ces vieux textos auxquels on s’était juré de répondre six mois plus tôt. 

Comme soudain tout s’agite, tout bouillonne. Comme on a l’air de faire des choses bien, au lieu de faire celles qu’il faut.

Bref, j’ai donc trouvé la recette pour maintenir ce blog en vie, et le sortir des limbes où sans cesse je le congédie. Il me suffit donc d’une deadline qui m’effraie – encore plus que d’écrire ici – et d’un agenda dégagé. 

Pas si compliqué. 

P.S. : sur la procrastination productive, il y a cette planche géniale de Claire Brétecher : “Création” (parue, je crois, dans Les Frustrés)

L’astuce des jours perdus

Je n’arrive pas à travailler. Je m’agace. 

Je n’aime pas les rendez-vous en plein milieu dans l’agenda. Rendez-vous à 11h, la matinée est tronquée, alors que c’est mon moment préféré, et j’ai le plus grand mal à me remobiliser l’après-midi, après déjeuner. Ça sent la journée perdue.

La to-do list est pourtant bien dodue. Par quoi commencer ? Tout paraît urgent. Autant dire que rien ne l’est. Des livres sinon ? Quitte à ne pas travailler, autant bien employer mon temps. Lequel attraper ? Tous paraissent tentants. Ridicule d’être figée comme ça, comme si n’importe quel choix serait le mauvais. 

La dernière fois que je me suis sentie comme ça, c’était pendant les vacances de Noël, et j’avais trouvé un joli remède à ma léthargie, inspirée du collage au lancer de dés d’Anne-Marie Jobin

J’avais numéroté 6 tâches de travail, et 6 activités de détente.
Puis je lançais le dé, en décidant d’avance si ce serait pour le travail ou la détente.
“2” : c’est parti, je m’attèle à la tâche n°2.
Je relance le dé pour décider combien de temps j’y passerai.
“4” : c’est parti, je m’attèle à la tâche n°2 pendant 40 minutes.
Quand les 40 minutes sont écoulées, je lance le dé pour m’attribuer une activité de détente, et savoir combien de temps j’y passerai.
Rien de contractuel, hein : si finalement, dans un bon élan, je me sens de passer 120 minutes au lieu de 40 sur une tâche, let’s.

Je reconnais que c’est vraiment l’astuce ultime des jours perdus. Des jours où les désirs, la volonté, et le sens des priorités ont l’air d’avoir déménagé sans prévenir sur la planète d’à côté.
Où on veut tellement tout faire en même temps, qu’on ne peut plus rien faire.
Où on regarde médusé-e l’heure tourner, et la confiance en soi se rouler en boule sous le canapé.

Une astuce pour les jours comme ça.
Une astuce que je crie pas trop sur tous les toits.
Sauf là. Au cas où ça pourrait servir à quelqu’un d’autre que moi.
Au cas où ça pourrait me servir à moi.
Un dé pour l’indécise, lancer pour s’élancer.

Roll the dice.

P.S.: Et chouette bonus de l’astuce, il se peut que tu te surprennes à murmurer tandis que le dé roule « trois, trois, faites que ça tombe sur trois ». Bonne nouvelle ! C’est qu’au fond, tu n’as pas besoin du dé, tu sais très bien ce par quoi tu préfères commencer.

Choses aimées 23-05

La cueillette de la semaine passée :

« Lorsque moi j’ai ouvert ma propre crêperie, j’ai failli déposer le bilan parce que je voulais tout offrir aux gens pour qu’ils aient une carte de fou. Et en fait, le fou c’était moi ! ». Patrick Rongier rappelle les règles : cuisiner vite et bien, être créatif sans jamais s’épuiser. (…) « Je dis toujours : seul le sarrazin sauvera le genre humain. »
Patrick Rongier, maître-crêpier, sur France Inter, le 2 février vers 8h17

être créatif sans jamais s’épuiser

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One of my favorite journaling prompts : “Today was a good day because…”
Shawn Blanc

a good day

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non, je pense pas que ce soit si difficile de tout arrêter, de tout quitter, de tout recommencer, autrement, il suffit de faire le premier geste, le premier pas, ne pas se lever un matin, ne pas répondre à ce mail si urgent, ne pas donner cours à cette requête si pressante, ne pas prendre le téléphone (..)
bastramu

tout recommencer, autrement

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We’re never the same person each and every time we pick up something we’ve previously failed several times. But our minds believe we are, so we tell ourselves: why bother to try again? I guess this is why physical exercise can be so life-changing. The point of exercise above a certain intensity is to fail – failure is what that brings progress. Once we realise and truly learn this, we are able to look forward to failing and not associate it with negative feelings.

That’s the thing about activities that require endurance. They will feel tedious and frustrating at the beginning, or they wouldn’t require endurance. There is developing the endurance for the activity itself – i.e. enduring the fatigue of running long distances or the monotonousness of chopping vegetables, and then there is a meta endurance that can be developed to endure the attempt to endure. This is mostly mental, to be able to continue doing something regardless of how we feel about it in that moment, to not give up because we feel frustrated.
winnie lim

look forward to failing (and not associate it with negative feelings)

endure the attempt to endure

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We all want to do our best work. We all want to create something of value. But what if you’re stuck? What if the solution just doesn’t show up, the idea just won’t come, the interesting just doesn’t want to happen? Writers sometimes call it writer’s block, but not only writers experience it. Everyone who does creative work knows this feeling of just not being able to make progress.

Whenever we’re stuck like this, it is important to recognize that this is totally normal and nothing to be worried about. Such a creative block isn’t really a blocker, it’s more of a short break. The best way to cope with this is to first of all continue to work. Inspiration strikes not when we sit and wait but when we start immersing ourselves in a problem. So don’t wait for the muse to kiss you. Walk on.
Matthias Ott

start immersing

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I once made an experiment, if I quit writing would I have a lot of spare time? And after three weeks I realized that I could just quit and never notice. The time would just vanish like throwing a stone into the water, it would leave no trace. So unless I was willing to just carve out this time for writing, I was never going to get anything done. It is a dilemma that I think everyone faces.
Connie Willis citée sur advicetowriters

carve out this time

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There is no pattern at all. None that I can recognize.

Some posts on this blog get twice or thrice as many views as others. This surge does not depend on the day of the week. It also doesn’t depend on the time of the day. Neither does it happen every month. Neither does it happen or not happen depending on how many times I blog. (Sometimes I post multiple times a day.)

The subject matter doesn’t seem to matter. The length either.

It’s just the result of the great forces of the internet working their magic.

And that is great. That gives me infinite freedom in what I write about.
Ithaka

infinite freedom

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Choses aimées 23-03

La cueillette de la semaine :

Ces 2 poèmes : “La cantoche” et “Insuffisant”
de Thomas Vinau sur son blog

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A chaque fois, j’oublie.
A chaque fois, la vie me dévore et j’oublie de venir écrire. Je me fais happer par toutes les distractions que le monde m’apporte. Je fais la pieuvre, je me lance dans mille projets en même temps. Je monte des projets, j’accompagne, j’écris pour d’autres. Je fonctionne pour le collectif et j’oublie mon dedans. Je cours partout et je n’écoute pas. Je fais des tours, des ronds, des cercles qui finissent toujours pareil.
A chaque fois, je reviens ici.
(…)
A chaque fois, je me rappelle.
Qu’il y a quelque chose à l’intérieur qui ne demande qu’à être posé. Ecrit. Que tous les mots qui papillonnent dans ma tête attendent simplement d’être attrapés. Couchés sur du papier. Que c’est ce que j’aime le plus faire et que j’oublie pourtant toujours. Concentrée sur ma carrière, mes projets professionnels, je me coupe de ce qui palpite en dedans. Tout ce qui me fait créer des choses à partir du néant.
lu sur le blog murmuration

à chaque fois, j’oublie
à chaque fois, je reviens ici

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Je le dis et le re-écris tant que cela est possible pour déculpabiliser certaines thèses têtes candidates au doctorat, un sujet évolue au gré et malgré toute bonne volonté de cohérence et de ligne droite. Certaines thématiques, angles d’approches, intérêts ou hypothèses de recherche sont tels qu’ils sont à domestiquer sur la durée, comme certains chats. (…)

Faites meute avec des enfants aussi perdus que vous.

Trouvez-vous un coin où tatônner dans le noir.

Gardez en tête la Louve anglaise

qui parlait de ses chambres à soi
dont on a encore besoin au-delà des espaces dont les cloisons se multiplient autour de nos écrans.

Partez de rien, pensez la déconstruction d’un système pour la fabrique du vôtre, trouvez votre ERRANCE FERTILE.
Margot Mellet dans son journal de recherche sur blank.blue

trouvez votre errance fertile

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Instead of crowding your attention with what’s already going viral on the intertubes, focus on the weird stuff. Hunt down the idiosyncratic posts and videos that people are publishing, oftentimes to tiny and niche audiences. It’s decidedly unviral culture — but it’s more likely to plant in your mind the seed of a rare, new idea.

I love the idea of “rewilding your attention”. It puts a name on something I’ve been trying to do for a while now: To stop clicking on the stuff big-tech algorithms push at me.

The metaphor suggests precisely what to do: If you want to have wilder, curiouser thoughts, you have to avoid the industrial monocropping of big-tech feeds. You want an intellectual forest, overgrown with mushrooms and towering weeds and a massive dead log where a family of raccoons has taken up residence.
Clive Thompson

focus on the weird stuff

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(en parlant de Louis De Funès) sa manière de fonctionner, sa mauvaise voix est délicieuse, ses défauts sont délicieux. Les défauts, les défauts des hommes, c’est ce qu’il y a de plus intéressant, c’est de ça qu’il faut parler, de nos défauts. Si on met un couvercle sur nos défauts, on se voile la face. La beauté de l’âme n’est pas très intéressante à représenter, les défauts oui.
Christian Hecq dans le grand atelier sur France Inter

c’est de ça qu’il faut parler, de nos défauts

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Il décrit l’avancée de son œuvre en deux ou trois mots plats. Il fait un croquis pour montrer sur quel bonhomme il travaille, il trace une flèche et il écrit :

jeudi les cuisses et les flancs
vendredi le bras
samedi cette tête de mort qui est sur le côté

C’est un rapport d’activité, ça pourrait être chiant à mourir, mais ça m’a passionné. L’art, c’est aussi ça : abattre du boulot, méticuleusement, jour après jour.
Antonin Crenn dans son journal

l’art c’est aussi ça : abattre du boulot, méticuleusement, jour après jour

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Que la peinture comme l’écriture ne cessent d’agir sur qui nous sommes, ou pensons être. Que peinture et écriture nous modifient. Non pas une image projetée vers un avenir. Mais plutôt à la façon qu’entreprend le sculpteur, en ôtant peu à peu de la matière pour enfin distinguer la forme. Une question importante qui revient régulièrement lorsque je peins, j’écris, c’est est-ce que le tableau ou le texte n’existe pas déjà en amont. Que ces objets, buts, intentions sont là depuis toujours, et que seules la patience et la régularité dans le travail permettent peu à peu de les distinguer.
Patrick Blanchon sur peinturechamanique.blog

seules la patience et la régularité

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Il s’agira, plus exactement, de consacrer 10 minutes (ou moins, bien sûr, mais pas plus !), chaque jour, à rédiger une liste des tâches que nous aurons effectuées, tâches liées à l’écriture et/ou à toute activité rémunérée. Si l’une d’entre nous considère que marcher, nager, cuisiner fait partie de l’écriture, elle l’inscrira dans sa liste.

Chaque jour, nous nous enverrons mutuellement nos listes par mail et je propose que nous programmions ces mails pour qu’ils arrivent à 18h dans nos boîtes respectives, quel que soit le moment où nous avons effectivement écrits, afin de ne pas parasiter nos sommeils respectifs. L’idée est de réussir à écrire et envoyer quotidiennement ses dix minutes.
Anne Savelli dans son semainier du 15 janvier 2023

si l’une d’entre nous considère que marcher, nager, cuisiner fait partie de l’écriture, elle l’inscrira dans sa liste.

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L’écriture, c’est la lutte. Se battre contre ce qu’on sait déjà faire, avancer vers le bancal, le ridicule, le mal foutu, le mal écrit, le mal nommé.
Anne Savelli dans son semainier du 22 janvier 2023

se battre contre ce qu’on sait déjà faire

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Je ne prétends pas avoir de solution, ni même de réponse. Je ne prétends pas non plus savoir comment traiter ces questions dans de la fiction, ni avoir les connaissances ou les compétences pour traiter ces questions de manière efficace. En fait, je ne prétends rien du tout, si ce n’est poser des questions.
Hortense Merisier sur son blog

je ne prétends rien du tout, si ce n’est poser des questions

Deadline

N’oublie pas de dormir, de te coucher tôt. N’oublie pas de respirer. N’oublie pas de manger bien, ni trop, ni trop peu, et des mets variés. Fie-toi aux couleurs pour agencer ton plat, sa diversité. Cueille des mots qui font du bien, te poussent comme le vent te pousse en marchant. Fais-leur une juste place, ne les empêche pas de t’y mettre, qu’ils soient soutien, pas distraction. Bois un dernier café après le déjeuner, réveille tes yeux. N’oublie pas le jeu, la pensée en mouvement. Utilise aussi le papier, le crayon. N’oublie pas de sortir, te promener, quelques minutes au moins, être ailleurs, offrir à ton corps autre chose que les genoux pliés devant l’ordinateur. Tiens bon quand ça vacille. Lâche ce M&M’s. Accroche-toi au travail, au labeur, pas de grandes idées, ni de lourdes méthodes, juste des gestes, hésitants, apprenants, obstinés, des astuces, des petites façons de faire, toujours à revoir, en construction. Prends ton temps mais ne le perds pas. Ne te décourage pas, la montagne n’est qu’une suite de pas. Au début, tu ne sais pas. Et tu y vas. Il n’y a pas d’autre chemin. Tu peux. N’oublie pas.

Le travail en revue #1

Ce billet fait suite à mise au travail #1.

Lundi dernier, j’ai eu cette idée saugrenue de publier mes objectifs de la semaine, dans l’espoir d’augmenter les chances de faire ce que j’ai dit, et dans l’idée de revenir ici, passer en revue les accomplis et les ressentis, traquer les mouvements et les impasses. 

Nous sommes lundi suivant, et à vrai dire, plusieurs sentiments s’emparent de moi. Avant d’entamer ce billet d’abord, un grand doute sur le format, dois-je revenir explicitement sur chacun de mes objectifs, faire des coches ou des croix puis les commenter, ou bien extraire plutôt quelques enseignements saillants de cette semaine ? En relisant les objectifs ensuite, un étonnement, tressé d’embarras : où sont passées mes heures, qu’ai-fait de mon temps, cette liste d’objectifs ne ressemble pas du tout à la semaine que j’ai vécue, dois-je revenir ici me flageller des engagements non tenus ?

Alors, je te demande un peu d’indulgence en me lisant. J’expérimente cet exercice, je cherche, le format évoluera sûrement. 

Une première pensée : le jour n’est pas le bon. Retracer la semaine écoulée le lundi, c’est déborder, empiéter sur la semaine qui démarre, ça tire en arrière et brouille l’envie de regarder maintenant et devant. Je déplacerai peut-être au samedi ou dimanche.

Maintenant, voyons.

tout en même temps : les études, la recherche d’emploi, la consolidation du projet de stage, le début du bénévolat, les envies d’écrire. Je me sens débordée sans l’être vraiment. En vérité, c’est largement faisable, l’enjeu est de trouver un rythme, de redessiner des contours pour me dédier à chaque chose dans un temps net, circonscrit. Retrouver du séquentiel. Un début et une fin. Puis de nouveau, un début et une fin. Cette semaine, tout semblait superposé, entremêlé, avec des heures qui se chevauchent, des tâches entamées, suspendues pour en intégrer d’autres, reprises, décousues. Un sentiment de ne pas arrêter, et pourtant de ne pas avancer. 

la lecture des textes : le plus efficace pour moi, en comparant deux lectures de textes denses et ardus cette semaine, est de faire une première passe en soulignant et en commentant à la marge, d’une traite, puis d’ouvrir un document et noter, assez rapidement, les points problématiques, les questions, les nœuds, ce que j’identifie comme la matière vivante. Ne pas se laisser un temps infini devant soi, choisir une durée, la réduire, et s’y tenir. Utiliser ce sentiment d’être pressé-e pour aller à l’essentiel, être en tension, engagé-e. Pour éviter de barboter, un œil dessus, la tête ailleurs. 

la discussion sur un texte en petit groupe : un tout autre défi, et je sens que ça coince à cet endroit. Pas une prise de conscience nouvelle, mais la récurrence du problème me surprend. J’en suis encore là. Crispée parfois par le flou des conversations, je suis saisie par l’envie de revenir au silence et à l’écrit. Heureusement, ce n’est pas toujours le cas. La discussion du dimanche compense plutôt bien celle du mercredi. Deux différences peut-être, dimanche nous n’avions rien à produire, et ce n’était pas prescrit. Juste discuter, et juste parce qu’on le voulait. Comme j’ai du mal avec ce qu’on m’impose, il y a des choses qui ne changent pas !

la lecture d’un texte en particulier, et d’ouvrages associés, pour une présentation et mise en discussion le mois prochain : je résiste, je refuse de m’y mettre, et je ne comprenais pas bien pourquoi, avant d’écrire ces quelques lignes ici. J’aime l’auteur, le sujet me passionne, ce qui bloque tient plutôt au contexte : l’horizon de parler de cet auteur et de cette méthodologie dans un petit cercle excessivement critique à son encontre. Je dois chercher un positionnement juste, où je ne chercherai pas à défendre, ou à représenter, car ça n’est pas l’objet. 

la marche, ça tient, quotidien. J’aimerais revenir bientôt aux 10 000 pas, et surtout en marchant, quand j’ai le temps, réveiller mon regard et mon attention, oser prendre des photos, me re-fabriquer étrangère à ma ville, avec la patience et l’étonnement des marches en voyage. La même curiosité.

le yoga, pas une fois. Je sais combien ça me fait du bien, je suis nostalgique d’une période assidue où j’en faisais chaque matin, et parfois même entre le job du jour et les cours du soir, le tapis comme un sas. L’habitude est simplement perdue. Ça va revenir, j’y crois.

les pages du matin en utilisant 750words, et le journal le soir, oh oui ça tient. Et ça me tient. Particulièrement la combinaison des deux, aux écritures et aux allures différentes. J’aimerais toutefois revenir aux pages du matin grattées sur papier.

l’écriture : pas de newsletter, pas de billet de blog hormis quelques réels et la publication des choses aimées, que j’adore agencer. Beaucoup de questionnements (pour changer). Le projet du cœur à l’ouvrage, ce que je cherche à y faire, être utile en acceptant de ne pas l’être. L’envie d’un autre blog (en plus, pas à la place de) sur le contenu de mes études, oui mais comment et quand. La pratique des réels, support d’écriture et de regard sur le quotidien, lâcher prise sur les jours pas faits, et surtout veiller à ne pas écrire un réel pour fuir un autre élan, l’écriture d’un billet, et se plaindre ensuite de ne pas avoir le temps de faire les deux. Ne pas faire du réel un prétexte. Ou bien en faire un pré-texte. 

les blogs : la découverte cette semaine de très nombreux blogs, très actifs, et toute cette vie en ligne, hors réseaux sociaux, tous ces coins de web, personnels, vivants, me mettent en joie. Un point d’attention : la bascule entre le moment où ces découvertes m’inspirent et celui où elles m’inhibent, quand je jalouse le style, l’audience, la régularité, tout. 

Mise au travail #1

Ce week-end, m’est venue l’idée* de publier ici mes objectifs, et surtout d’y revenir ensuite pour dresser un état des lieux, commenté. Une façon de m’engager, d’augmenter les chances de faire ce qui est dit. Une manière aussi de prendre le temps de regarder comment j’ai fait, ce qui marche et ce qui résiste.

En avril 2022, j’ai entamé un journal d’études audio. Chaque matin, j’ouvrais la fonction dictaphone et partageais mes intentions du jour, et chaque soir, je revenais sur les réalités du jour, l’accompli et les ressentis, les faits et le vécu. Et je publiais, quotidiennement. Soutien solide de mes efforts, ce rituel m’a remis le pied à l’étrier, j’ai formidablement bien travaillé.

Je m’interroge sur la fréquence : publier des objectifs annuels, mensuels, hebdomadaires, journaliers ? Ce matin, la fréquence hebdomadaire me semble appropriée : suffisamment régulière pour créer une tension, un mouvement, suffisamment espacée pour avoir le recul et la matière pour commenter. Je m’autorise la possibilité de changer en cours de route.

Je m’interroge aussi sur la nécessité de thématiser cette publication : faut-il restreindre aux objectifs en lien avec mon projet de formation, avec ma recherche d’emploi, avec le soin de soi, avec les pratiques d’écriture ? Je décide que ça n’aurait pas beaucoup de sens de compartimenter et qu’il vaut mieux que la publication soit le reflet de ces tous azimuts, au risque d’être un peu foutoir.

Enfin, je m’interroge sur l’intérêt que ça peut représenter pour celleux qui me liront. Que vaut cette idée ? Est-ce qu’elle ne sert qu’à moi ? Est-ce que cela peut soutenir les efforts et la réflexion d’autres personnes ? Je ne peux pas savoir avant de le faire. Et ma foi, je me fie à mon propre goût, j’aime lire ce genre de choses ailleurs, j’y trouve une impulsion ou un écho. Ce qui n’est pas rien.

*en découvrant le concept du brag document de l’année (vantardoc) via Fanny Cheung.

Objectifs – 2023, Semaine 2

Études
lire les 40 pages de V., jusqu’ici parcourues en diagonales, noter les points essentiels de chaque section, être capable de les restituer
travailler en profondeur les notes du cours du mardi, identifier tes questions restantes
lire le texte à présenter de C., faire une première passe pour cerner les mouvements du texte, les questions, les difficultés
lire le livre de C.
retranscrire les notes du cours du vendredi
contacter l’administration pour clarifier les possibilités du stage

Recherche emploi
chaque jour candidatures, ne pas y passer plus de 2h

Écriture
envoi d’une newsletter
chaque jour un réel à prise rapide
bonus : chaque jour un billet de blog

Soin de soi
chaque jour yoga
chaque jour marche
chaque jour pages du matin, sur papier ou sur 750words

EDIT du 16 janvier 2023 : retour sur ces objectifs, une semaine plus tard, dans le travail en revue #1

Quelques choses apprises

Nous y voilà, le 31. J’ai parlé hier d’un exercice assez classique pour faire un “bilannée”. Je préfère finalement ce mot à celui de bilan qui m’évoque des réunions poussiéreuses et saturées d’affreux powerpoint. Revenons à nos moutons, cet exercice de bilannée consiste à extraire des choses faites, vécues, ce qu’on en a appris. Comme on extrait le jus d’un fruit. Délicieux. Vraiment. Super antidote au risque de prendre les faits pour des faits accomplis, sans vie, bouche bée. Super invitation à regarder ce qu’ils ont semé pour la suite, ce qu’ils ont à nous dire. Les ranimer pour les faire balises de nos sentiers. 

Dans mon bilannée, j’ai donc d’abord listé quelques trucs que je trouvais réussis, dont j’étais plutôt fière, et je me suis demandée ce qui avait permis, facilité ces choses-là. Puis j’ai listé quelques trucs que je trouvais ratés, manqués, dont je n’étais pas très fière, ou frustrée, et je me suis demandée ce qui avait empêché, fait obstacle, ou provoqué ces choses-là.

J’aime lire ce que d’autres ont appris, la façon dont iels explorent leur propre vie, ce qui taraude, ce qui réjouit, et ce qu’iels peuvent en dire. Alors je partage ici, moi aussi, quelques choses apprises cette année : 

n’attends pas d’être prêt-e, d’être préparé-e : j’ai enfin interviewé A., alors que j’en parlais depuis bientôt 3 ans je crois. Si j’ai tant repoussé, c’est parce que j’attendais de savoir précisément le fil rouge de l’entretien, les thèmes à aborder, les questions que j’allais poser, et le format dans lequel je le restituerai. Un jour, j’ai enfin dit, sans rien savoir de tout ça : notons une date dans l’agenda ! Deux heures avant l’interview, je n’avais rien de prêt, je me suis attablée et assez vite j’avais sous les yeux une dizaine de pages de questions (oui, c’est trop). L’interview est faite, et en cours d’édition pour être bientôt publiée (j’ai hâte !). J’ai adoré ce moment. N’attends pas d’être prêt-e. J’ai été très nostalgique cette année de celle que j’étais 10 ans plus tôt, de mes audaces, de mes effervescences, d’un tas de choses faites, et en regardant bien, je me suis rappelée ma technique imparable à l’époque : je disais je le fais avant de savoir comment. 

pars du principe que tu vas y arriver : je me suis lancée seule dans un montage de meubles assez complexe, avec un mode d’emploi qui dit bien qu’il faut être deux, et j’ai craint jusqu’au dernier moment de ne pas pouvoir soulever la bête. Mais je suis partie du principe, dès que j’ai ouvert les cartons, que j’allais y arriver. C’était décidé. J’ai sué, soufflé, pesté, paniqué, pris des photos pour m’auto-féliciter, mais j’y suis arrivée. Et j’ai réalisé à quel point, sans même me le formuler aussi clairement, je décide parfois que je ne vais pas y arriver, que c’est hors de ma portée, hors de mes capacités. Je me demande tout ce qui pourrait exister si je décidais d’emblée que je vais y arriver. 

le dernier coup de collier : c’est une expression bien enracinée dans mes souvenirs d’enfance, donner un coup de collier, fournir cet effort soutenu, sur une période donnée, pour enfin, enfin, venir à bout de ce qu’on a commencé. J’ai entrepris cette année un grand rangement de mes papiers, photos et tous fichiers numériques, vaste chantier, et alors que j’avais presque fini… je me suis écroulée de lassitude, et j’ai laissé tomber. Je ne sais même plus où j’en étais du classement, c’est beaucoup plus dur de s’y remettre que ça ne l’aurait été de continuer et de terminer ! C’est un exemple parmi d’autres : je me vois faire l’effort, le plus dur presque, et c’est juste avant la ligne d’arrivée que je choisis au lieu de parcourir les derniers mètres d’aller poser mes fesses sur le côté. Bon, pour la suite, je tâcherai d’être attentive sur certains projets au dernier coup de collier. Au courage de faire les derniers mètres.

temps morts et pratiques vivantes : ça tourne en boucle, quand j’écris (oh je n’y arriverai pas, je n’y arrive plus, pas comme avant), quand j’étudie (oh je n’arrive plus à travailler autant, comment me discipliner, ça ne reviendra jamais et autres sanglots étouffés d’anxiété) et puis finalement j’écris et j’étudie. Et j’y prends un plaisir inouï. C’est toujours la même histoire, parce que ça n’est qu’une histoire. Ma légende personnelle – quoique je crois la partager avec un bon nombre de personnes -, ce récit dans lequel j’aime me vautrer, qui me fait perdre un temps fou. Oui, ça revient. Oui, je peux écrire de nouveau, c’est dur mais je peux. Oui, je peux étudier de nouveau, lire, rédiger, me discipliner, m’y tenir. L’erreur, vraiment, c’est plutôt d’arrêter. Tous les temps morts dans ces pratiques vivantes qui me font croire que ce qui était possible hier requiert une force surhumaine aujourd’hui. Garder le rythme, garder le lien avec son travail, son écriture, ses projets, soigner ces relations-là aussi. Faire un peu, souvent. Ne pas laisser des temps morts s’installer trop longtemps. Maintenir ses pratiques vivantes. 

tourne la poignée : la peur a pris beaucoup de place, a grignoté du terrain sur ma vie, mon quotidien ; et si, le plus souvent, j’ai réussi à faire ce que j’avais à faire malgré tout, c’est en pensant à ce passage du livre Wild de Cheryl Strayed sur la peur et la puissance (cité ici). Parfois, ces derniers mois, la main sur la poignée de la porte, quand tout mon corps se figeait, je pensais à elle, randonnant seule sur le Pacific Crest Trail, à ce passage de Wild, et je tournais la poignée. J’y allais. La peur prend tous les bouts de terrain que tu lui laisses. Elle s’immisce partout où elle peut. Elle gagne sans se battre, elle gagne où tu ne luttes pas. Tourne la poignée.

Aujourd’hui un projet

Aujourd’hui je m’y tiens. Un projet, un seul : étudier. Je m’y remets sans mal, et à peine le choix fait, la passion revient. Je laisse les bribes d’écriture de côté. Je laisse les autres projets en sourdine exister. Sous les arbres, je vois soudain comme ces projets sont familiers. En psychologie, comme en écriture, tout devient matière, à sentir, penser, travailler. En psychologie, comme en écriture, cette même question comme une rengaine : qu’est-ce qu’on en fait ? Créer du possible, de nos impossibles, de nos silences, de nos impasses, de nos inachevés.