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Aujourd’hui la toute première question qu’on va vous poser

Tu plaisantes ? C’est sans doute la toute première question qu’on me posera si je gagne aujourd’hui. 13 millions, moi qui ne joue jamais, sauf un astro poissons une fois par an. Qu’est-ce que tu comptes en faire ? sera sans doute la deuxième. J’y ai pensé d’un trait avec des euros casino dans les yeux. Très vite défilent trains, cargos, houle et roulis, paysages, et tracent un immense sourire sur mon visage. Pas très original. Heureusement que je n’ai pas gagné, je n’aurai pas à me soucier de l’originalité des toutes premières réponses à donner.

[espaces compris] le lieu de ma plus grande peur

Le lieu de ma plus grande peur ? Un lieu, un seul ? À 30000 pieds du sol, mains moites sur l’accoudoir, carlingue cercueil des pires cauchemars. À 7 mètres sous terre, tunnel traquenard, foule et mains moites sur la barre. Ma plus grande peur : un lieu, un seul. #EspacesCompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

Fragment d’aujourd’hui raconté en poésie

Inquiète
Pas en paix, pas en place
Cherche réconfort, sas et vestibule,
Où patienter, m’impatienter, m’attendrir
Toujours un hier, un demain
Hante, tourmente, ravit l’aujourd’hui
La belle inquiétude, entre les songes et le qui-vive
La belle inquiétude, absente et attentive
Prête à tout moment
Jamais disponible pour autant
La belle inquiétude réclame des mots et du silence
De place et du temps
Car n’est-ce pas là que tout commence ?

Passer à l’action – mode d’emploi 1

Comment arrêter de procrastiner ? Comment faire pour réviser, étudier, écrire, travailler ? Réponse horripilante : faites-le, c’est tout.
Dans cet esprit, voici un mode d’emploi ou tuto de la plus haute sophistication, à lire attentivement, à exécuter avec précaution, chaque étape compte, l’ordre aussi.
Rédigé pour des révisions, quelques ajustements de votre cru – très peu – sont à prévoir pour d’autres réjouissances telles que : faire votre comptabilité, votre ménage,votre CV, vos triple saltos, votre cinquième roman. Faites-le, c’est tout.

S’asseoir, à son bureau, table à manger, toute surface plane. Déplier le bras. Tendre le bras. Attraper le livre qui attend. Le rapprocher de soi. Laisser la couverture nous dévisager. Nous occuper. Nous appeler. Détourner le regard. Tenter d’y échapper. Continuer de scroller. Papillonner. D’onglets en onglets. Du coin de l’oeil. Surveiller le livre. Toujours là. Ouvrir le livre à la page désirée. Coincer le livre de sorte qu’il tienne ouvert. Sentir le moment se rapprocher. Le point de non retour. Fermer un onglet. Un deuxième. Expirer. Boire un peau d’eau. Souffler, soupirer dramatiquement. En faire trop. Se traiter de feignasse. Se demander pardon. Se redresser. Trouver une assise acceptable. Inspirer. Passer la main sur ses yeux, son front. Avec douceur, soutien. Croiser les bras. S’enlacer, se tenir fort, par les omoplates. Inspirer. Expirer. Tourner la tête dans un sens. Puis dans l’autre. Éteindre radio, vidéo, musique, réseaux sociaux. Prêter l’oreille aux autres sons. Eboueurs, voitures, église, enfants, petits oiseaux. Sentir ici, maintenant, que ça peut commencer. Ouvrir le document pour écrire, prendre vos notes, travailler. Placer le curseur au bon endroit. Fermer les derniers onglets récalcitrants. Boire un peu d’eau. Se redresser. Ignorer la peur. Ignorer la flemme. Commencer petit. Commencer un peu. Lancer un chrono de 25 minutes. Pomodoro. Petite tranche de temps. Zut craquer au dernier moment. Ouvrir un mail. Le lire. Repousser de quelques secondes encore. Allez allez. Cette fois c’est bon. Plonger
Lire quelques lignes
Taper quelques mots
Raccrocher les wagons
S’enlacer, se tenir fort
Se dire que c’est possible
Puisque ça y est nous sommes lancé·e·s

Aujourd’hui IL FAUT

Temps merveilleux, idéal pour buller au bord de l’eau, quelque part en France où sentir des pins ou du chèvrefeuille, déjeuner d’une tomate basilic, se laisser bercer par les heures et le vent. Mais il faut travailler, rester à Paris, devant l’écran, ouvrir le livre et continuer, envier le soleil par la fenêtre, repousser les douces rêveries, la tentation de prendre un sac à dos et un aller simple vers un ailleurs au goût d’été. IL FAUT l’écrire en grand car en petit, aujourd’hui, ça ne marche pas.

Refaire sentier

De retour d’une semaine à la campagne, où j’ai travaillé quelques heures, par-ci par-là, au milieu des souvenirs et des oiseaux chantants…

Suivie d’un week-end de mariage, où j’ai aussi peu dormi et autant ri autant bu qu’à 22 ans…

Il est temps de remettre sur pied mon quotidien, mon appartement, un plan de travail, un jour après l’autre.

J’ai parfois du mal avec les coupures, même petites. Le temps a pris une autre forme, mon corps d’autres habitudes, il faut revenir, ici, maintenant, regarder devant. Reconstituer, raccommoder, les rituels, les évidences. D’autres choses ont pris de la place, beaucoup de place, c’est comme s’il fallait les pousser, les repousser, pour pouvoir continuer. Refaire sentier.

Évidemment, ça ne marche pas comme ça. Forêt dense.

Tambourinent en boucle
des questions sur la petite maison, ce qu’on en fera, qui l’habitera, qui paiera
une conversation dans la nuit noire et froide, dans mon silence et quelques larmes
l’amour
les bons petits plats
le bord de la rivière avec mes neveux et mes bouquins
les chansons à pied
la cueillette du 1er mai
l’attente sur le quai, petite pancarte tracée à la hâte, la joie
les pages du matin griffonnées en pleine journée quand il a fallu trouver de la force, en déposant, quelque part, ce qui débordait
le travail mal assise, mal installée
les rires, les câlins, les chassés-croisés
le retour à 160km/h sur l’autoroute et les mains moites, ne pas oser dire un peu moins vite, revoir des bâtiments, des gens, du bruit, des sourcils froncés, comment fait-on toute l’année
l’étrangeté de l’appartement, à la fois si vide et trop chargé
s’apprêter, mariage en vue
les rires, les rires tellement
la complicité
faire rire, bonheur oublié
le faire rire et se rappeler
l’alcool très triste après le shot qu’il fallait pas prendre, 3h du mat’ je crois
au réveil, le tibia tout bleu, je ne me souviens pas
la chute me revient quelques heures plus tard, quand petits fours, belle vue, on rit tous de nos visages pâles, grands bâillements et petits yeux

Tambourinent en boucle tous ces moments-là.
Ils occupent.
Ils ont pris la place de.

Je les mets où, le temps de travailler ?

Je me suis dit ce soir qu’en les écrivant comme ça, taille timbre-poste, taillés à la hâte, à la hache, ils seraient au moins quelque part, consignés, et pourraient me laisser avancer.

Et c’est vrai, ça marche un peu.

Et toi, dis-moi, qu’y a-t-il dans ta forêt, qu’est-ce qui tambourine, quels doutes et merveilles ? ESt-ce qu’écrire t’aide aussi parfois à refaire sentier ?

[espaces compris] le lieu où j’ai vu mon premier cadavre

La pente pleine de graviers, le bâtiment-bloc, le choix d’y aller, de poser ma bouche sur son front glacé, son visage déformé, son costume jamais vu, disparus son bleu de travail, ses joues chaudes et joviales, son odeur, son regard et ses histoires. #EspacesCompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

Aujourd’hui comment lui dire ?

Assise à mon secrétaire d’enfance, blanc écaillé par le temps, le même sous-main aux fleurs roses, au dehors les oiseaux en fête, le même tilleul flamboyant, majestueux s’approche de la fenêtre, au loin tondeuse dans un jardin, chien qui aboie. Le soleil perce. Quelques parfums transportent des années en arrière, mais il n’y a qu’ici, maintenant. Je ne peux pas réellement être autre part qu’ici, maintenant. Et pourtant. Comment lui dire, à cette petite fille, que tout sans cesse disparaîtra, et que tout sans cesse reviendra ? Un jour d’avril, avec au dehors les oiseaux en fête.

[espaces compris] le lieu de mon premier baiser

Après un cœur tracé sur nokia, grande cuisine, meubles en bois, lumières éteintes pour l’étreinte, dans l’ombre et la timidité, baiser nerveux et maladroit noyé dans nos sourires, puis le carrelage si froid, ses muscles, son tact et nos peaux collées ce soir-là. #espacescompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

Aujourd’hui table de

Sur mon secrétaire, se bousculent péniblement l’ordinateur, la trousse remplie de piles et de monnaie, le livre à lire, la tasse à ras bord de tisane, les trente carnets à trier, les feuilles en vrac – gribouillages téléphoniques, objectifs “du jour”, notes de réunion, horaires de train. Je rêve d’un bureau immense, grande table de travail, où m’étaler, où à la fois laisser vivre et ordonner le bordel. Depuis mon secrétaire, j’entends l’eau et les pales du lave-vaisselle tourner, tempêter. Je rêve de murs, de pièces, de limites et de frontières, d’un espace pour chaque fonction. Quand j’ai du mal à m’y mettre, je rêve de choses très matérielles comme solutions toutes faites à ma procrastination.

[espaces compris] la maison de mes grands-parents

…enfin, l’appartement de mes grands-parents.

En haut des marches essoufflées, double-séjour tapissé, fauteuils crapauds, soupière remplie de pastilles Vichy, buffet-table assortis, grosse TV pour déjeuner, cuisine bleu-formica, radio pour éplucher, livres et moquette, baignoire en coin, toilettes aux murs orange&noir fleuris, le sourire des derniers jours dans un grand lit.


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

[espaces compris] ma cour de récréation

Aux billes, aux funambules, à l’élastique, à la tomate : jouer partout de chaque rebord, chaque recoin, chaque racine, chaque faille dans le sol. Dans la grande cour, plus tard, jouer pas tout à fait, typologies, territoires, messes basses, regards en coin. #EspacesCompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

Le dictaphone

Journée très productive, comparée aux soixante dernières. Je me remets enfin plus sérieusement aux lectures dans le cadre de mes études, délaissées en m’occupant de ce site à me perdre dans des détails labyrinthiques, et en me faisant de fausses promesses « demain, demain, toujours demain ». En fin de matinée, j’ai ouvert la fonction dictaphone, j’ai lancé à voix haute « journal d’études, jour 1 » et j’ai simplement dit en long et en large (9 minutes, beaucoup trop long, beaucoup trop large) que je m’y remettais, et quel livre j’attrapais. Et je crois que toute la journée, j’ai tenu – malgré la difficulté à me concentrer, les passages ardus du texte, la tentation de plutôt scroller à l’infini sur Twitter – grâce à cet audio que j’avais fait et qui d’une certaine manière m’obligeait. Ce soir, j’ai rouvert le dictaphone, très fière de pouvoir dire « j’ai bien avancé ! » (6 minutes quand même, toujours trop long). Je ne sais pas si je publierai ces audios, ça me paraît inintéressant, mais dans le même temps, je sais aussi combien on peut se sentir seul·e quand il faut avancer et qu’on a du mal, et j’ai trouvé parfois beaucoup de réconfort à lire ou écouter des personnes qui partageaient, jusque dans les moindres détails, leurs tentatives, leurs élans, leurs processus.

[espaces compris] la chambre de mes parents

Dans le salon, un canapé-lit gris vert indéfinissable, déplié chaque soir, replié chaque matin, l’habitude et les maux de dos ; et le samedi trop tôt, dans le noir, leur sommeil gâché par la télé allumée, mes dessins animés sous casque. Silence, images colorées. #EspacesCompris

à partir de la proposition d’écriture #espacescompris