Aujourd’hui une bonne chose de faite

Avant-hier, on sollicite mon avis sur un rapport, j’émets quelques réserves sur la façon dont une page est tournée, on m’invite à rédiger une alternative. Craignant de repousser, de buter, je m’y mets, une fois n’est pas coutume, de suite et ponds la page au plus vite, dans l’heure qui suit la réunion. Aah. Une bonne chose de faite. Hier, on me remercie, pour la tournure plus habile, bien reformulée. Ooh. Une chose bonne de faite. Aujourd’hui, un autre on me dit que l’argumentaire ne tient pas. Aïe. Une bonne chose de faite à refaire.

Aujourd’hui tête pleine de

Aujourd’hui, tête pleine d’idées sans mots. Je voudrais écrire et surtout publier, revenir habiter ce lieu, je regrette tout ce que je n’ai pas noté ces derniers mois. Il faut tout noter tout le temps, faire des réserves, ne pas croire qu’on se souviendra. Des idées il y en a, la tête oui pleine de ça, mais les mots me glissent des doigts. J’ai peur de ne plus savoir, de ne plus savoir aimer les je-ne-sais-pas.

[espaces compris] mon endroit préféré au salon

Les oreilles attentives d’un fauteuil gris moelleux, où lover mon corps las, où creuser des heures pleines de films, où boire mille tisanes fumantes, où voir la vie des autres, la pluie cogner, les soleils du matin flamboyer, et dans la nuit les lumières résister. #EspacesCompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

Aujourd’hui j’étais un animal quand

Je décide d’écrire à nouveau, chaque jour. D’essayer du moins. Par où commencer quand on a si longtemps arrêté. Le temps, le vide, créent un trop-plein d’attentes et d’exigences. Il faudrait, pour un retour, créer quelque chose d’éclatant, se distinguer. Leçon supplémentaire pour l’avenir : le régulier dégonfle cet orgueil, donne au réel plus de palettes pour exister, du bon, du moins bon, du très mauvais, la douceur de faire avec les jours sans. J’étais un animal tapi, craintif du jeu et du dehors, je sors aujourd’hui voir si l’hiver peut devenir printemps.

Aujourd’hui séduction de

Aujourd’hui, je prépare à la dernière minute une interview, je prépare trop tard, et quand même je prépare un peu trop. Je ne veux pas d’un truc très édité, très pensé car si c’est joli dans l’idée, je trouve ça moins intéressant à lire ou écouter : on risque de se laisser un peu séduire par soi-même, au détriment de l’écoute de l’autre et de ce qui est présent. Je ne veux pas non plus d’un truc sans queue ni tête, sans cadre, sans intention, sans respect pour celui ou celle qui se prête au jeu. Mystère des choses qu’on évite et dans lesquelles on s’entête : je fais les deux. Quelque chose de trop pensé, qui ne laisse pas place à l’imprévu, à la pensée qui se construit à deux, aux silences, au spontané. Et quelque chose d’en même temps trop décousu, on ne sait pas où ça va, d’où ça part, pas de fil. Mystère des choses (impar)faites : je trouve malgré tout ce moment très réussi. J’ai adoré et me réjouis de bientôt recommencer.

[espaces compris] ma cuisine

Décor de pain, pommes, tisanes, bocaux et grands couteaux jamais utilisés. Plan de travail abîmé. Premier rôle pour la machine à café, d’un bouton séisme à répétition. Frigo fier d’arborer des cœurs crayonnés et titrés : « joyeux noël tata tait la meilleur tata du monde entier ».


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

[espaces compris] ma chambre d’étudiante

Surface carrée pour un lit, des livres, un bureau, cuisine quasi dinette, douche et toilettes, parfait, trop parfait, balcon taillé pile pour tenir debout, assise, fumer, rêver, surtout ne pas travailler. Les toits à perte de vue, et ces livres… pas lus. #EspacesCompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

[espaces compris] le lieu qui m’a le plus marquée à l’étranger

À pied, à vélo, aux heures libres, s’enivrer des champs d’agrumes, buffles d’eau, paysage obsédant, règne vert, pics de karst dressés vers le ciel voilé, plongés dans le fleuve miroir. Jour après jour de l’étrange au familier.Parler de gestes et de regards. Guangxi #EspacesCompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

[espaces compris] le lieu où je me suis perdue

En plein Paris, plein soleil, dans un silence un choc un printemps, nos corps retrouvés, mon cœur perdu, au milieu des jeux des arbres frémissants, brouhaha, ma nuque et ton baiser, deux mois avant la fin de toi, de ton visage de tes mains et des soleils parisiens. #EspacesCompris


à partir de la proposition d’écriture #espacescompris

Aujourd’hui un projet

Aujourd’hui je m’y tiens. Un projet, un seul : étudier. Je m’y remets sans mal, et à peine le choix fait, la passion revient. Je laisse les bribes d’écriture de côté. Je laisse les autres projets en sourdine exister. Sous les arbres, je vois soudain comme ces projets sont familiers. En psychologie, comme en écriture, tout devient matière, à sentir, penser, travailler. En psychologie, comme en écriture, cette même question comme une rengaine : qu’est-ce qu’on en fait ? Créer du possible, de nos impossibles, de nos silences, de nos impasses, de nos inachevés.

Aujourd’hui la sécurité c’est

Aujourd’hui la sécurité c’est tenir fermement mes clés en arrivant dans le local poubelles, prête à les planter dans l’œil de tout individu malfaisant qui surgirait. Personne n’a surgi, j’ai continué de serrer mes clés en remontant.

Aujourd’hui la sécurité c’est employer des mots plutôt délicats et littéraires pour masquer le fait que j’ignore à peu près tout du sujet dont on parle dans cette réunion. Personne n’a remarqué, j’ai continué de sourire en écoutant.

Aujourd’hui la sécurité c’est être désignée personne de confiance par celui qui va subir une petite intervention, et par ce signe-là, se sentir aimée. Personne de confiance, j’ai continué d’y penser toute la journée.

Aujourd’hui un mot en anglais

D’un coup la lumière est tombée, suivie de quelques gouttes. Franches, nettes, menaçantes. Le tonnerre n’a pas tardé, suivi de grands éclairs, juste au-dessus de nos têtes. L’orage en ville vu d’un fauteuil, d’une fenêtre. À la fascination se mêlent un frisson ancestral, une peur lointaine, animale, ce sentiment d’être une bête. Minuscule, vulnérable, à l’affût du fracas, car on ne sait pas de quoi la terre est capable. Me vient ce mot en anglais, puisque le réel en réclame un : awe, sentiment d’admiration mêlé de crainte, terreur, émerveillement. Je jette un œil sur wikipédia. La page est illustrée d’un orage.

Aujourd’hui la toute première question qu’on va vous poser

Tu plaisantes ? C’est sans doute la toute première question qu’on me posera si je gagne aujourd’hui. 13 millions, moi qui ne joue jamais, sauf un astro poissons une fois par an. Qu’est-ce que tu comptes en faire ? sera sans doute la deuxième. J’y ai pensé d’un trait avec des euros casino dans les yeux. Très vite défilent trains, cargos, houle et roulis, paysages, et tracent un immense sourire sur mon visage. Pas très original. Heureusement que je n’ai pas gagné, je n’aurai pas à me soucier de l’originalité des toutes premières réponses à donner.