Entre les jours

Capture écran de Les lieux de Marguerite Duras partie II

Dans Les lieux de Marguerite Duras de Michelle Porte (1976), à partir de 49′ :

« C’est sans doute l’état que j’essaie de rejoindre quand j’écris. Un état d’écoute extrêmement intense. Les gens vous disent qu’on est là dans la concentration quand on écrit. J’ai le sentiment d’être dans l’extrême déconcentration. Il y a des choses que je ne reconnais pas dans ce que j’écris donc elles me viennent bien d’ailleurs. Je ne suis pas seule à écrire quand j’écris, mais ça je le sais. La prétention c’est de croire qu’on est seul devant sa feuille alors que tout vous arrive de tous les côtés. Evidemment les temps sont différents, ça vous arrive de plus ou moins loin. Ça vous arrive de vous, ça vous arrive d’un autre, peu importe : ça vous arrive de l’extérieur. Ce qui vous arrive dessus, dans l’écrit, c’est sans doute la masse du vécu si on peut dire tout simplement. Mais cette masse du vécu non inventorié, non rationalisé, et dans une sorte de désordre qui est tous les jours un désordre originel. On est hanté par son vécu, mais il faut le laisser faire. « 
(…)

« Elle est hantée comme un lieu hanté. C’est ça, Lol V. Stein. c’est quelqu’un qui chaque jour se souvient de tout pour la première fois, et ce « tout » se répète chaque jour, elle s’en souvient chaque jour pour la première fois, comme s’il y avait entre les jours de Lol V. Stein. des gouffres insondables d’oubli. Elle ne s’habitue pas à la mémoire, ni à l’oubli d’ailleurs. »

Laisser un commentaire