se
donner perdue, patiente, tout entière au réel –
au
courage –
faire usage
des vagues –
choses sans dénouement
poème autodaté mais aussi fondu à partir de mon journal
Le poème fondu est une forme inventée par Michelle Grangaud. Il s’agit d’écrire un poème à partir des mots d’un autre poème. On m’a initiée à cette forme avec des consignes un peu plus libres : écrire un poème à partir d’une double-page de roman, d’essai, de magazine, etc. La règle reste de n’utiliser que des mots contenus dans ce texte-souche, n’en ajouter aucun. À vous de voir ensuite quel degré de contrainte vous souhaitez vous imposer : possibilité ou non de répéter un mot, possibilité ou non de les transformer (modifier la conjugaison d’un verbe, passer du pluriel au singulier, etc.). Faites-moi signe si vous publiez des poèmes fondus, j’adore en lire.
franchir
la flaque des petits matins frais – sauvages – craquelés – et
faire
visage de
mes mains
dans la plaie
Poème autodaté mais aussi fondu à partir de deux textes-souches : le journal de bord des Vagues 123 de Christine Jeanney et les pages 30 et 31 de Ici ça va de Thomas Vinau
prendre
les peurs qui ne parlent pas
prendre
le corps
écorché d’
angoisse prendre peau
Poème autodaté mais aussi fondu à partir des pages 30 et 31 du Journal d’un corps de Daniel Pennac, Gallimard
regarder
la nuit
danser
sous l’épais feuillage
laisser
une phrase
un baiser
jusqu’à son visage
soigner
la vie
entre les pierres
tombales
Poème fondu à partir des pages 30 et 31 de Betty de Tiffany McDaniel (éditions Gallmaister, 2022)
la nuit qui tombe sur la mer
personne ne peut parler
en un sens
c’est plus profond
aucun langage
ne sortira inchangé
on ne nous apprend pas
à appeler les choses
en présence
par leur nom
on se souviendra
sans doute
du silence
de la nuit qui tombe
sur d’autres mots
//
poème presque fondu à partir des pages 30 et 31 d’un livre universitaire
la peur
d’imaginer
sa propre vie
à contre-courant
comme un champ de ruines,
un roman
j’avais commencé
j’étais bien décidé
le samedi suivant
je n’avais pas la moindre idée
besoin de silence
Caviardage à partir de Philippe Lançon, Le lambeau (pages 30 et 31, Éditions Gallimard, Collection Folio)
discerner la pluie
brusquement
tout près
tout autour
des larmes miniatures
des larmes effacées
d’une main sûre
on aurait dit une présence
sans importance
un visage brodé
sans détails
des souvenirs
sans signature
gommés d’une main sûre
Poème fondu d’après Emily Ruskovich, Idaho (pages 30 et 31)