Après avoir écrit mon contenu d’hier (« La quête infinie des cartes enfouies »), j’ai ouvert quelques newsletters dont celle d’Austin Kleon et j’y ai découvert cet article qui aurait pu très bien le compléter : « Pourquoi c’est difficile d’imiter des dessins d’enfant ? « .
En réponse à cette question qu’on lui pose, Austin suggère que les enfants vont aux extrêmes de leurs capacités pour dessiner, tandis que les adultes, pour les imiter, se retiennent en quelque sorte.
Puis il fait part d’une hypothèse beaucoup plus intéressante selon lui, celle de Linda Barry, dessinatrice de bande dessinée. Elle dit : « Un dessin d’enfant ce n’est pas le trait, c’est le geste. C’est le mouvement naturel humain. On voit ça aussi chez les scientifiques…regardez comment ils bougent leurs mains sur le tableau pendant qu’ils réfléchissent. (…) Ce que j’ai fini par comprendre c’est : et si c’était à ça que le trait ressemblait, non seulement quand vous avez une idée, mais que le trait lui-même vous donne une idée« .
« C’est ce que les gens oublient ou ne soupçonnent pas : le dessin peut non seulement aller de votre tête à la page mais aussi et surtout remonter de la page à votre main jusque dans votre tête. Voilà le type de dessins que font les enfants. Ils dessinent et ils voient ensuite ce qu’ils sont en train de dessiner.«
Oui, oui, oui, mille fois oui. Le trait lui-même vous donne une idée, le dessin remonte de la page vers la main jusqu’à la tête. Je parle finalement beaucoup beaucoup de ça ici, je crois que j’ai tout simplement besoin de me le répéter, encore et encore ! Moi qui tant de fois reste figée face à la page, face au commencement, qui demeure immobile de peur d’effrayer les fragiles petites bêtes qui s’invitent dans ma tête. Souvent et à tort persuadée qu’il s’agit de faire descendre des idées, de faire en sorte que le tracé reproduise fidèlement ce que je me suis imaginée. Comme si la création ne connaissait qu’une trajectoire : celle du haut vers le bas.
Pourtant, je constate bien, et avec joie, que le mouvement, le geste, le faire nourrissent et transforment profondément tout ce que ma tête peut comploter seule dans son coin. Que l’immobilité ne préserve rien et chasse au contraire toutes les chances de créer. Je vois comment l’inspiration circule, du bas vers le haut. On sent bien, c’est corporel, que parfois ce sont les mots qui nous emploient.
Et je suis totalement fascinée par ces processus, beaucoup plus d’ailleurs que par les résultats.
Créons, créons, créons et voyons ensuite ce que nous sommes en train de créer.